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Quand on passe la porte de cette ancienne halle à négoces sur le port du Légué, le regard évalue d’abord la hauteur sous plafond, cathédrale de pierre aux poutres apparentes.
L’atelier est immense, oui, c’est vrai. Puis, au fur et à mesure, l’oeil remarque et rebondit sur les poteries, l’objet de la visite. Formes, couleurs et usages variés, elles investissent l’espace au sol et sur les étagères.
Histoire d'un bol
Etienne Huck apparaît. Le thé fume, introduction à notre échange. Au commencement, il y avait un bol. Au Japon, ce sont les maîtres du thé qui ont inspiré les potiers. Les invités de la cérémonie du thé décoraient le bol dans lequel ils allaient boire ce breuvage. Cette unité, qui affleure dans l’esprit zen et bouddhique, sont les racines de ce que cherche Etienne Huck. La poterie, par ses gestes relevant quasi de l’auto-hypnose, est un voyage en soi. Des voyages, Etienne Huck en a fait, à l’instar de son aïeul arrivé par bateau au Légué depuis la Norvège, avant de revenir s’installer ici en 1992. Au Danemark d’abord, où il a appris à faire émerger la forme de la matière, la terre. La terre peut venir de son jardin ou d’autres lieux, mais il y a toujours a minima une terre locale dans ses poteries. Chacune a sa propriété, réagissant différemment à la cuisson.
Etapes en contraste
Les étapes, en réalité plus complexes, demeurent les suivantes, qu’il s’agisse de grès émaillé comme ici, de faïence, de céramique et de porcelaine. La terre mélangée prendra place et forme sur le tour. On comprend alors aisément ce qu’Etienne explique, dans la présence à ce qu’on fait. La fluidité du geste appelle la fluidité de la pensée. Souffle et méditation en trame de fond. Le vase, la tasse obtenus sont souples encore. Après séchage à l’air libre, l’objet devient très fragile. La cuisson par milliers de degrés s’effectue dans un four électrique ou à gaz, ce dernier, moins homogène et privilégié, apporte certains effets. A ce stade, le spectateur perçoit un maillage de maîtrise et d’aléatoire.
Volcanique
Arrive l’étape de l’émail, et des notions de chimie. L’émail est une formule composée de 3 éléments : silice (composant du verre), alumine et fondant, lors de notre visite, du magnésium. Sur le mur, des échantillons tests permettent à Etienne Huck de retrouver les effets de la cuisson sur certaines alliances. La texture des mélanges est très variable, veloutée comme de la pâte à crêpe, solide comme de la pierre. La pièce y est trempée, ou ornée de motifs. Elle retournera ensuite au four. Le potier fait l’analogie avec le phénomène volcanique, une image qui résonne lors d’ateliers avec les scolaires. Les japonais eux-mêmes étaient inspirés par le Mont Fuji.
Du général au particulier
Etienne Huck aime se nourrir des échanges, constater par exemple comment ses clients s’approprient ses créations en détournant leurs usages. Il crée aussi sur commande pour des particuliers et des professionnels, tel ce restaurant de la Baie de Saint-Brieuc en quête de carafes. En partant, il nous conseille Le livre du Potier de Bernard Leach.
Amoureuse de la Baie à plein temps.